Bribes de vie
Du soleil et de la douceur, enfin. Des promenades en écharpe, dans l'odeur si douce des fleurs de tilleul, pendant lesquelles l'Acrobate s'endort contre moi, et ne se réveille parfois même pas quand je le couche dans son lit, à notre retour. Des nuits mouvementées, rendues plus inquiétantes encore par la chaleur et la peur de la déshydratation. Des fantasmes qui gâchent nos nuits, qui gâchent nos vies, mais dont nous ne savons pas encore nous affranchir.
La vie de fou de l'Amoureux, qui n'a plus assez de 24 heures pour tout faire. Ma patience aux bornes mouvantes, la fatigue qui me tombe brutalement dessus et me rend dure, sans pitié, sans compassion. Une minute, je suis agréable, la suivante, la frontière est franchie, Dr Jekyll se transforme en Mr Hyde.
La panique de Monsieur Chien devant les courants d'air, une étrangeté de son caractère qui semble s'accentuer avec l'âge. 
Le flegme et la douceur de Mademoiselle Chat, dont les moments de folie continuent à me faire sourire et rire. L'urgence à se fabriquer des souvenirs, puisque la décision est prise, et le rendez-vous aussi : vendredi, elle prendra le train avec une inconnue, pour retrouver en pays catalan celui par qui elle était arrivée chez moi, celui chez qui, peut-être, elle sera plus heureuse qu'ici. La frustration en constatant que depuis que cette même décision a été prise, les choses semblent s'être nettement améliorées : en un mois, zéro bêtise, que des câlins et de la tendresse... La voix de la raison, qui dit qu'elle a besoin d'une stabilité que nous ne pouvons plus lui offrir ; celle du coeur, qui rappelle les progrès qu'elle a faits depuis son arrivée dans ma vie, et ceux qu'elle continue à faire, le plaisir qu'elle semble avoir à nos câlins du soir, l'amour que j'éprouve pour elle, le trou qu'elle va laisser dans nos vies à tous...
Une porte refermée, une île disparue dans la brume, et l'inquiétude, encore, devant le silence. La peur de gêner, toujours, qui retient la main au moment de se saisir du téléphone. A partir de quand y a-t-il non-assistance à personne en danger ? Mais à partir de quand y a-t-il intrusion ?...
La contradiction si caractéristique d'un état de grande fatigue, l'envie dévorante de faire mille choses, de tout ranger, de tout nettoyer, les pensées qui s'entrechoquent et font fuir le sommeil, après la tétée de la mi-nuit, et la pesanteur, au matin, qui alourdit les gestes et laisse le programme prendre du retard, le désordre régner, l'insatisfaction s'installer.
L'Acrobate qui grandit, et qu'il faut désormais habiller dans un mélange de 6 mois et de 9 mois. "Deux dents dans la mâchoire à Jean", deux dents pour lui aussi, des pieds qu'il prend désormais plaisir à attraper, à goûter, à triturer. Des mouvements en veux-tu en voilà, des retournements dos-ventre parfaitement maîtrisés, des retournements ventre-dos enfin gérés, autant d'outils qu'il utilise pour se déplacer, et explorer les alentours. Notre étonnement devant ses progrès, notre admiration aussi. Et notre amour, chaque jour plus grand, chaque jour plus fort...
(Clin d'oeil à Telle, qui devrait reconnaître quelque chose sur la photo...)
Et le mois de juin comme un mois-couperet, un mois-décision. Si je dois trouver un nouveau poste, ce sera ce mois-ci. Sinon, retour chez Mme de Trémaine au mois de septembre !...
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